08/12/11

A INMACULADA CONCEPCIÓN / A. BRETÓN & P. ELUARD

A Virxe arreándolle ao Neno Xesús
Max Ernst, 1926

in
                                                                  A aventura surrealista




La vie intra-utérine

N’être rien. De toute les façons qu’a le tournesol d’aimer la lumière, le regret est la plus belle ombre sur le cadran solaire. Os croisés, mots croisés, des volumes et des volumes d’ignorance et de savoir. Par où faut-il commencer ? Le poisson naît d’une épine, la guenon d’une noix. L’ombre de Chistophe Colomb tourne elle-même sur la Terre de Feu, elle n’est pas plus difficile que l’œuf. (…)
D’une rive à l’autre, les lavandières se jettent le nom d’un personnage fantastique qui parcourt la terre en simulant la haine pour tout ce qu’il embrasse. Leurs chansons sont tout ce qui me transporte et qui est pourtant transporté, comme les pigeons voyageurs photographes prennent sans le vouloir des vues du camp ennemi. Leurs yeux sont moins loin de moi que le vautour de sa proie. J’ai compris que le visage de la femme ne se montre pas que dans le sommeil. Il est dans l’éblouissement, parmi les herbes régulières des cieux. Du dedans comme du dehors, il est la perle qui vaut mille fois la mort du plongeur. Du dehors, il est la fronde admirable, du dedans il est l’oiseau. Les ronces le déchirent et les mûres le tachent de noir, mais il accorde aux buissons la source singulière de son bouillonnement de lumière.
On ne peut savoir ce qu’il est devenu depuis que je l’ai découvert.
La biche entre deux bonds aime me regarder. Je lui tiens compagnie dans la clairière. Je tombe lentement des hauteurs, je ne pèse encore que ce que donnent à peser de moins cent mille mètres. Le lustre éteint qui m’éclaire montre les dents quand je caresse des seins que je n’ai pas choisis. De grandes branches mortes les transpercent. Les soupapes, qui s’ouvrent et se ferment dans un cœur qui n’est pas le mien et qui est mon cœur, sont tout ce qui se chantera d’inutile sur une mesure à deux temps : je crie, nul ne m’entend, je rêve.
Ce désert est faux. Les ombres que je creuse laissent apparaître les couleurs comme autant de secrets inutiles.
Je vais, dit-on, voir. Je vais, voit-on, entendre. Le silence à perte de vue est le clavier qui commence par ces vingt doigts qui ne sont pas. Ma mère est une toupie dont mon père est le jouet.
J’ai pour séduire le temps des parures de frisson, le retour de mon corps en soi-même. Ah ! Prendre un bain, un bain des Romains, un bain de sable, un bain de sable d’ânesse ! Vivre comme il faut savoir se nouer les veines dans un bain ! Voyager à dos de méduse, à fleur d’eau et puis sombrer dans les profondeurs pour avoir l’appétit des poissons aveugles, des poissons aveugles qui ont l’appétit des oiseaux qui hurlent à la vie ! A-t-on entendu chanter les oiseaux vers quatre heures de l’après-midi en avril ? Ces oiseaux sont fous. C’est moi. A-t-on déjà vu le soleil couvrir la nuit de son poids mort, comme le feu couvre la cendre ? J’ai pour soleils le passage de la flamme à la fumée, la plainte affolée d’une bête traquée et la première goutte d’eau d’une averse.
ANDRÉ BRETON  E PAUL ELUARD: A Inmaculada Concepción, París, 1930



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